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Grossesse et vaccinationprint

La vaccination maternelle : protéger le bébé

publié le mercredi 19 septembre 2018

Grâce à la vaccination des femmes enceintes, l’immunité du bébé peut être améliorée et des infections survenant dès la naissance peuvent être évitées.
Cette stratégie est appliquée avec succès pour la prévention du tétanos néonatal, de la coqueluche et de la grippe. Elle pourrait également être utilisée pour prévenir certaines septicémies et la bronchiolite chez les nourrissons. Cependant, il existe d’importantes lacunes dans les connaissances de l’immunobiologie des vaccinations maternelles.

Des chercheurs de l’Université Libre de Bruxelles, University of Oxford, University of British Columbia, University of Western Australia et University of California San Francisco ont identifié des projets de recherche prioritaires dans le domaine de la vaccination maternelle au nom de la Fondation Bill & Melinda Gates.

Généralités

La vaccination des femmes enceintes est un moyen important pour améliorer la santé des bébés : elle permet d’augmenter la quantité d’anticorps qui est transférée à travers le placenta au bébé, le protégeant contre des maladies qui surviennent dans les premiers mois de la vie, soit jusqu’au moment où le risque n’existe virtuellement plus (par exemple après 3 mois pour les septicémies à streptocoques du groupe B), soit jusqu’à ce que l’enfant puisse être vacciné (coqueluche notamment).

La vaccination protège également la mère et l’enfant à naître contre les conséquences parfois graves d’une infection (par exemple la grippe). Pendant la grossesse, les femmes sont plus sensibles à la grippe en raison de changements dans le système immunitaire. En conséquence, elles courent un plus grand risque de développer des complications ou de devenir plus gravement malades.

Effets de la grossesse

La grossesse est un moment de modifications importantes des mécanismes d’immunorégulation. Ces adaptations, essentielles à la survie du foetus, interfèrent probablement avec la réponse aux antigènes vaccinaux. Par ailleurs, la grossesse influence l’activité des cellules immunitaires B et des cellules présentatrices de l’antigène, ainsi que la production des immunoglobulines G (IgG). La présence d’infections chroniques (par exemple paludisme, VIH) peut également influencer la réponse vaccinale.
L’ensemble de ces phénomènes ne sont pas encore connus avec précision.

Transfert d’immunité

Par la vaccination maternelle, on vise à accroître l’immunité maternelle et le transfert de celle-ci au foetus. Cette immunité transmise est cruciale pour la protection antimicrobienne du bébé durant les premiers mois de la vie, jusqu’à ce qu’il acquière une immunité active (via la vaccination ou l’exposition aux agents pathogènes).

La protection du nouveau-né repose sur deux mécanismes : le transport actif des IgG maternelles à travers le placenta et l’allaitement maternel.

Transport actif transplacentaire

Les IgG sont les seuls anticorps directement transférés via le transport actif transplacentaire. La part essentielle du transfert se déroule après la 28ème semaine de gestation. Une naissance prématurée réduit donc la quantité d’anticorps transférés au nouveau-né. La quantité d’anticorps transférés est influencée par de nombreux facteurs, tels que la spécificité de l’antigène et la sous-classe d’IgG, les infections maternelles chroniques, la présence d’une hypergammaglobulinémie, etc. 
La disparition progressive des anticorps maternels chez le bébé est influencée par de nombreux facteurs. 
Une concentration minimale d’anticorps doit être atteinte pour offrir une protection clinique au nouveau-né et doit se maintenir jusqu’au moment où l’enfant ne court plus de risque ou bénéficie d’une immunisation active. Cependant, une concentration élevée d’anticorps maternels transmis peut interférer avec la réponse immunitaire de l’enfant, tant sur le plan quantitatif (taux d’anticorps) que sur le plan qualitatif (avidité des anticorps pour les antigènes).


Allaitement maternel

L’importance du rôle de l’allaitement maternel est attestée par la réduction du risque d’infections et de la mortalité associée dans la petite enfance. Le développement de l’immunité infantile est stimulé par les composants immunitaires du lait maternel (notamment les hautes concentrations d’IgA), qui contribuent au développement d’une immunité à plus long terme au niveau des muqueuses. Plusieurs études ont démontré, suite à la vaccination de la mère durant la grossesse, l’augmentation des IgA spécifiques correspondant aux vaccins administrés (grippe, coqueluche, virus respiratoire syncytial (VRS), Streptococcus pneumoniae et Neisseria meningitidis). 
Le lait maternel comporte aussi des IgG (en proportion dix fois inférieure aux IgA), dont le taux a tendance à s’élever avec la durée de l’allaitement.

Cependant, de nombreuses lacunes subsistent dans la compréhension des réponses vaccinales pendant la grossesse, du transfert et de la persistance de l’immunité maternelle chez les nourrissons, ainsi que des interactions entre les anticorps maternels et le système immunitaire infantile.


Axes de recherche prioritaires

Les stratégies vaccinales sont spécifiques à chaque maladie, ce qui rend complexe la perspective d’un vaccin combiné destiné à la vaccination des femmes enceintes.
Sur la base de recherches documentaires et de conseils d’experts du monde académique, pharmaceutique et politique, les chercheurs ont identifié 20 axes de recherche prioritaires concernant quatre maladies : la coqueluche, la grippe, les streptocoques du groupe B et le virus respiratoire syncytial (VRS).

Les 20 lacunes les plus importantes dans les connaissances relatives à la vaccination pendant la grossesse
1. Effet du type d’antigène vaccinal sur la réponse immunitaire maternelle.
2. Effet de la santé maternelle sur la réponse immunitaire maternelle.
Transfert transplacentaire d’anticorps
3. Effet du moment de vaccination sur le transfert net d’anticorps IgG.
4. Effet du type d’antigène sur le transfert d’anticorps IgG
5. Effet des complications de la grossesse sur le transfert des anticorps IgG.
Protection du fœtus et du nouveau-né
6. Effet des vaccinations maternelles sur les taux d’anticorps dans le sang ombilical.
7. Effet des vaccinations maternelles sur la réponse immunitaire de l’enfant.
8. Pertinence clinique de l’interférence de l’immunisation passive via la vaccination de la mère avec les immunisations actives de l’enfant.
9. Effet des anticorps maternels sur les cellules B « effectrices » et « mémoires » des enfants.
10. Modulation des composants immunitaires dans le lait maternel par la vaccination, et effet de ceci sur l’immunité de l’enfant.
Vaccination contre la coqueluche
11. Corrélations de protection (concentration requise d’anticorps) contre la colonisation, la maladie et la mortalité.
12. Besoin de plusieurs antigènes du bacille de la coqueluche, rôle de la toxine de la coqueluche.
13. Réactogénicité des doses répétées de vaccin contre le tétanos, la diphtérie et la coqueluche acellulaire lors de grossesses successives.
Vaccin streptococcique du groupe B
14. Corrélations de protection (concentration requise d’anticorps) contre la colonisation, la maladie.
15. Immunogénicité, transfert et protection spécifiques du sérotype.
16. Effet du sérotype sur les corrélations de protection.
17. Effet de la protéine porteuse sur la réponse immunitaire de l’enfant.
Vaccin VRS
18. Corrélations de protection (concentration requise d’anticorps) contre la maladie et la mortalité.
19. Protection contre les infections des voies respiratoires basses.
20. Impact de l’immunité existante sur la réponse maternelle.

Les chercheurs conseillent d’étudier l’impact de la nature de l’antigène vaccinal sur la réponse vaccinale de la femme enceinte et sur le transfert d’anticorps au bébé.
Les anticorps maternels peuvent moduler la réponse vaccinale chez le bébé. Grâce à l’étude des mécanismes immunologiques qui jouent un rôle dans cette modulation, la vaccination maternelle et pédiatrique pourrait être efficacement améliorée dans le futur.

Référence
Marchant A, Sadarangani M, Garand M, et al. Maternal immunisation : collaborating with mother nature. Lancet Infectious Diseases.


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