Pneumocoque
Nouvel avis du CSS
Le Conseil supérieur de la santé a actualisé en 2015 son avis relatif à la vaccination contre le pneumocoque des enfants et adolescents.
Epidémiologie
Le S. pneumoniae peut être responsable d’infections invasives (méningite, septicémie, pneumonie, etc). Une infection est invasive lorsque le S pneumoniae peut être identifié dans un fluide corporel normalement stérile, comme le sang, le liquide céphalorachidien ou pleural ou péritonéal ou articulaire.
Avec l’introduction de la vaccination généralisée en 2004 (vaccin conjugué 7-valent), l’incidence des infections invasives à pneumocoques (IIP) chez les enfants de moins de 2 ans a fortement baissé, passant de 156/100.000 en 2012 à 56/100.000 en 2013. Cette réduction de plus de 60% est liée à une chute importante des sérotypes inclus dans le vaccin. La réduction d’incidence est moins marquée parmi les enfants de 2-4 ans (43/100.000 en 2002 versus 33/100.000 en 2013).
En 2013, les sérotypes suivants ont été identifiés :
- pour 95 des 110 cas d’IIP enregistrés chez les enfants de moins de 2 ans : 14% étaient des sérotypes présents dans les vaccins 10- et 13-valents, dont 2 uniquement présents dans le 13-valent et 2 communs aux vaccins 10- et 13-valents.
- pour 86 des 101 cas d’IIP enregistrés pour les enfants de la tranche d’âge 2-4 ans : 66% étaient des sérotypes présents dans les vaccins 10- et 13-valents, dont 2 uniquement présents dans le 13-valent et 3 communs aux vaccins 10- et 13-valents.
Pour l’ensemble des cas d’IIP chez des enfants de moins de 5 ans, les sérotypes les plus fréquents étaient les 1, 12F, 19A, 24F et 33F. Ce sont surtout les bactériémies et les méningites qui diminuent, ces dernières voyant leur incidence passer de 19/100.000 à 4/100.000.
Le S. pneumoniae peut également entraîner des infections non invasives limitées aux muqueuses (pneumonie communautaire sans bactériémie – CAP ou community acquired pneumonia-, sinusite, otite moyenne aiguë – OMA). Une étude montre que le S. pneumoniae est impliqué dans plus de 73% des CAP hospitalisées en Belgique entre 2008 et 2009 chez les moins de 15 ans.
Par ailleurs, le S. pneumoniae et/ou l’Haemophilus influenzae sont responsables de 80% des OMA. L’incidence de ces dernières est estimée en 2008- 2010, à 223-228/1.000 enfant-année chez les enfants de moins de 4 ans. Cette incidence élevée est à l’origine d’un coût médical et sociétal important.
Vaccins
Pour rappel, le vaccin conjugué à 7 valences (Prevenar 7TM) a été introduit dans le schéma vaccinal recommandé en Belgique en 2004 et proposé par le programme de vaccination des Communautés en 2007. Depuis lors, deux autres vaccins conjugués, l’un à 10 valences (SynflorixTM), l’autre à 13 valences (Prevenar 13TM), ont été mis sur le marché. Actuellement, le vaccin 13-valent est utilisé dans le programme de vaccination en Communauté française.
Dans le vaccin 10-valent, 8 sérotypes sont conjugués à une protéine d’Haemophilus influenzae et les sérotypes 18C et 19F respectivement à l’anatoxine tétanique et à l’anatoxine diphtérique. Dans le vaccin 13-valent, tout comme dans le vaccin 7-valent, tous les sérotypes sont conjugués à la toxine diphtérique modifiée. La composition des 3 vaccins conjugués est détaillée au tableau 1, page suivante.
Selon le CSS, les vaccins 10-valent et 13-valent ont un profil qui convient à la situation épidémiologique belge actuelle des infections à S. pneumoniae, pour les enfants.
La réponse immunitaire induite chez les enfants par les vaccins conjugués est très bonne.
Le taux de réponse (séroconversion avec atteinte d’un taux d’anticorps considéré comme protecteur) et l’efficacité vaccinale varient selon les sérotypes et les vaccins. L’avis du CSS reprend en détail les données publiées des études disponibles.
En Belgique, l’impact du programme de vaccination avec le vaccin 7-valent, pour les enfants de moins de 2 ans, a été estimé pour les IIP en général à 46% (IC 95% : 34-56) et pour les IIP dues aux sérotypes contenus dans les vaccins à 96% (IC 95% : 93-98).
Après l’introduction des vaccins PCV13 et PCV10 dans les programmes de vaccination dans d’autres pays, les études montrent les mêmes tendances d’efficacité, avec un impact sur les IIP liées aux sérotypes additionnels, sauf pour le sérotype 3, et une diminution de l’incidence du sérotype 19A y compris dans les cohortes vaccinées par le PCV10. Une réduction des infections non invasives (CAP et OMA) est également constatée.
Les effets indirects de la vaccination des enfants sur les IIP chez les adultes non vaccinés sont suivis. Il est trop tôt pour tirer des conclusions, car les études montrent des résultats contrastés, avec une baisse d’incidence des IIP chez les sujets âgés de plus de 65 ans (Norvège, Danemark, France, Espagne-Navarre) et une absence d’effets indirects (Pays-Bas, Finlande). Un phénomène de remplacement des sérotypes vaccinaux est constaté dans plusieurs études et des données anglaises et européennes, après plus de 4 ans d’utilisation du PCV13, montrent que l’incidence globale parmi les personnes de 65 ans et plus est redevenue supérieure à celle lors de l’introduction du vaccin 13-valent chez les enfants. La pertinence clinique de cette observation n’est pas claire.
Pour la pratique
La primovaccination antipneumococcique complète des nourrissons comporte, pour les vaccins 10- et 13-valents, 3 doses (2 plus 1) selon le schéma 8 et 16 semaines, puis 12 mois.
Pour les bébés prématurés, un schéma en 4 doses (3 +1) est recommandé, à 8, 12 et 16 semaines, puis à 12 mois.
Que faire en présence d’un retard de vaccination ?
- Lorsque la première dose est administrée avant l’âge de 10 mois, la deuxième est donnée à 8 semaines d’intervalle et la troisième à l’âge de 12 mois (et au moins 8 semaines après la deuxième).
- Si la première dose est administrée à l’âge de 10 ou 11 mois, une deuxième dose est donnée à l’âge de 12 mois (et au moins 8 semaines après la deuxième).
- Si une dose est donnée entre 12 et 24 mois, aucune dose supplémentaire n’est indiquée.
- Au delà de 24 mois, le vaccin n’est plus administré si l’enfant ne présente pas un risque accru d’infection invasive à pneumocoque.
Que faire pour les enfants présentant un risque fortement accru d’infection invasive à pneumocoque ? (voir tableau 2)
Ces enfants doivent bénéficier d’un schéma de vaccination contre le pneumocoque adapté.
- Les enfants âgés de 2 à 12 mois recevront 3 premières doses du vaccin 10- ou 13-valent avec un intervalle de 6 à 8 semaines et un rappel avec le même vaccin 10- ou 13-valent à l’âge de 12 mois. Une dose de vaccin polysaccharidique 23-valent sera administrée après le 2ème anniversaire.
- Pour les enfants âgés de plus de 12 mois, jusqu’à 5 ans :
– déjà vaccinés (2 doses de primovaccination et un rappel avec le vaccin 7-valent ou 2 doses de primovaccination avant l’âge de 12 mois avec le vaccin 13-valent) : administration d’une dose de rappel de vaccin 10- ou 13-valent, puis après le 2ème anniversaire et à au moins 8 semaines d’intervalle, une dose du vaccin polysaccharidique 23-valent.
– jamais vaccinés ou vaccination incomplète : administration de deux doses du vaccin 10- ou 13-valent à 8 semaines d’intervalle, puis après le 2ème anniversaire et à au moins 8 semaines d’intervalle, une dose du vaccin polysaccharidique 23-valent.
- Pour les enfants de plus de 5 ans : une dose de vaccin 13-valent peut être administrée, suivie à au moins 8 semaines d’intervalle d’une dose du vaccin polysaccharidique 23-valent.
Trois groupes de patients présentent un risque accru :
1 - Enfants immunocompétents présentant les facteurs de risque suivants :
- porteurs d’implant cochléaire ;
- maladie cardiaque chronique (notamment une maladie cardiaque cyanogène congénitale, insuffisance cardiaque, hypertension avec complications cardiaques) ;
- pneumopathie chronique (bronchectasie, mucoviscidose, dysplasie bronchopulmonaire, fibrose pulmonaire interstitielle, maladie neuromusculaire avec risque d’aspiration, asthme grave traité par stéroïdes systémiques) ;
- Autres maladies métaboliques ;
- Fuite de liquide céphalo-rachidien (suite à un traumatisme ou une intervention chirurgicale crânienne majeure).
2 - Asplénie fonctionnelle, dysfonctionnement de la rate (par exemple : drépanocytose homozygote) ou splénectomie.
3 - Enfants souffrant d’immunodépression :
- Immunodéficience congénitale ;
- Traitement immunosuppresseur et autres immunodéficiences acquises y compris leucémies, néoplasmes, lymphomes, greffes de moelle osseuse et d’organe solide et infections par le VIH ;
- Maladie rénale chronique (syndrome néphrotique, insuffisance rénale chronique) ;
- Diabète non équilibré.
Le vaccin 10-valent est indiqué chez les nourrissons et enfants âgés de 6 semaines à 5 ans. Le vaccin 13-valent peut être utilisé chez l’enfant plus âgé en rattrapage, pour les mêmes indications (ndlr : le vaccin 13-valent peut aussi être administré aux adultes).
Les vaccins conjugués contre le pneumocoque sont généralement bien tolérés.
Les effets indésirables peuvent se manifester : fièvre, irritabilité, érythème, induration ou tuméfaction au site d’injection, somnolence ou sommeil perturbé.
Lors de l’administration d’une dose de rappel, chez les enfants plus âgés, un érythème ou une induration plus marqué (2,5 à 7 cm) et plus fréquent peut survenir.
Références :
– Vaccination de l’enfant et de l’adolescent contre le pneumocoque. Avis n° 8813. Conseil supérieur de la santé. 2015.
http://www.vaxinfopro.be/IMG/pdf/csspneumoenfants2015.pdf
– Fiche 10. Enfants à risque accru d’infections invasives à pneumocoques. Conseil supérieur de la santé. Révision 2013.
http://www.vaxinfopro.be/IMG/pdf/css8757enfrisquepneumo2013.pdf
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