Les infections à Influenza causent une morbidité et une mortalité conséquentes parmi les groupes de personnes à haut risque.Un article récemment publié dans le Lancet fait le point sur les effets favorables, pour la protection des patients à haut risque, de la vaccination des professionnels de santé. On escompte de cette approche, complémentaire à la vaccination des personnes les plus vulnérables, une protection indirecte liée à une moindre transmission du virus de l’Influenza. Dix-huit études ont été prises en considération par les auteurs. Deux essais menés dans des hôpitaux gériatriques (Ecosse) montrent une réduction significative de la mortalité des patients après introduction d’un programme de vaccination de l’équipe soignante. En outre, cette approche semble justifiée sur le plan économique puisqu’elle est cost-effective et probablement cost saving .

Des réticences malgré les recommandations

La vaccination contre la grippe des professionnels de la santé est recommandée par les autorités scientifiques de la plupart des pays occidentaux.
En Belgique, les recommandations du Conseil Supérieur d’Hygiène sont univoques.
Pourtant, le taux de professionnels de santé vaccinés contre la grippe reste en moyenne très bas (entre 2 et 30% selon les études et les lieux). Dans les nombreuses études menées, les raisons invoquées par les professionnels non vaccinés démontrent à la fois un sentiment d’invulnérabilité vis-à-vis de la maladie et une croyance faible en l’efficacité de la vaccination.
Pourtant, il est bien démontré que le risque de contracter la grippe est nettement plus élevé pour une personne travaillant dans un hôpital ou une structure d’accueil que pour la population générale. Ainsi, pendant une saison grippale modérée en 93-94 à Glasgow, on a diagnostiqué par sérologie une grippe chez 28% des 518 travailleurs de santé d’une institution, alors que le taux d’attaque de l’influenza saisonnier est de 5 à 10% (25% pendant la pandémie de 1918).
Une autre publication (reprenant 12 épisodes d’influenza nosocomial) fait état d’un taux d’attaque atteignant jusqu’à 59% parmi le personnel s’occupant des patients atteints d’influenza.
Quant au déficit de perception de l’efficacité de la vaccination, il est couplé à une peur des effets secondaires, à une réticence vis-à-vis de l’injection, à une crainte que le vaccin puisse transmettre l’influenza, etc. Face à cette situation, de nombreuses voix évoquent « un devoir de vaccination des soignants » et la nécessité d’initier un débat éthique au sein de toutes les structures de soins concernées.

Bibliographie

– A. Burls et al. Vaccinating healthcare workers against influenza to protect the vulnerable - Is it a good use of healthcare resources ? A systematic review of the evidence and an economic evaluation. Vaccine 2006 ;24 : 4212-4221.
– A. Elder et al. Incidence and recall of influenza in a cohort of Glasgow healthcare workers during the 1993-4 epidemic : results of serum testing and questionnaire. BMJ 313 (1996), pp. 1241–1242
– Cassandra D et al. Influenza in the acute hospital setting. Lancet Inf Dis 2002 ;2:145
– RE Thomas et al. Influenza vaccination for health-care workers who work with elderly people in institutions : a systematic review. Lancet Infect Dis 2006 ; 6:273-79.