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Hépatite Aprint

Hépatite A et B : Protection de longue durée après vaccination

publié le jeudi 1er mai 2003

Dans le monde, l’hépatite virale reste une maladie à haut taux de morbidité et de mortalité. Chaque année, 1,4 million de cas de contamination par l’hépatite A sont rapportés, mais l’incidence réelle est probablement 3 à 10 fois supérieure. Selon les estimations, environ un tiers de la population mondiale a été contaminée à un moment par l’hépatite B. En 2002, l’OMS a évalué à 367 millions le nombre de porteurs chroniques de l’hépatite B et à 1 million le nombre de personnes décédées des suites de complications chroniques (notamment cancer du foie) et d’infections aiguës.
Des vaccins contre l’hépatite B existent depuis 1982, contre l’hépatite A depuis 1992. Un vaccin combiné A + B est disponible depuis 1996. Cet article récapitule les données disponibles en matière de protection de longue durée offerte par les vaccins contre les hépatites A et B.

Vaccin contre l’hépatite B

Le vaccin contre l’hépatite B est généralement administré en trois ou quatre doses selon un schéma d’injection 0, 1 et 6 mois ou de 0, 1, 2 et 12mois. Certains pays conseillent encore l’administration d’un rappel 5, 7 ou 10 ans après la primovaccination. Aucun consensus n’existait, jusqu’il y a peu, sur l’opportunité de l’ administration d’une dose de rappel uniquement en fonction de la période écoulée depuis la primovaccination, ni sur le fait qu’il faille tenir compte du taux d’ anti-HBs [1]. Ceci s’ explique peut- être par le fait que, dans certains pays, on accorde – à tort – énormément d’importance à la diminution des taux d’anti-HBs et qu’on ne fait pas toujours la différence dans les recommandations entre la protection contre les infections subcliniques et cliniques et la présence d’anticorps et d’une im- munité cellulaire.
Pourtant, cette distinction est primordiale. En santé publique, il est surtout important de prévenir le portage chronique du virus de l’hépatite B, afin d’éviter ainsi les affections hépatiques chroniques et de limiter le mieux possible la transmission de la maladie.
Des études au long cours sur des cohortes vaccinées et une meilleure compréhension du rôle de la mémoire immunitaire liée aux vaccins plaident pour ne plus administrer une injection de rappel après une primovaccination réussie.
Une diminution, quelques années après la vaccination, du taux d’anti-HBs jusqu’à un niveau non ou peu mesurable n’est pas une chose rare [2]. Mais la protection contre le virus de l’hépatite B est un processus complexe, au cours duquel les lymphocytes B à mémoire, les lymphocytes T helper, les lymphocytes T cytotoxiques à mémoire et les complexes anticorps - antigènes jouent un rôle. Ceci explique pourquoi, chez un individu vacciné depuis 10 ans ou plus et exposé à l’antigène de surface du virus de l’hépatite B, les lymphocytes B à mémoire se mobilisent dans les trois à cinq jours contre l’HBsAg, même si la concentration d’ anti-HBs circulants n’est pas ou est à peine mesurable.

Si l’on combine les données de 12 études de suivi, menées sur plus de 5.000 nourrissons, enfants et adultes, il s’avère qu’aucun de ces individus n’a développé d’infection clinique, même pas parmi un groupe de personnes vaccinées chez qui aucun anticorps n’avait pu être détecté [3] [4].
Une étude de suivi récente n’indique que quelques infections parmi des enfants gambiens, quatorze années après vaccination. Il convient d’ajouter que certains de ces enfants avaient été vaccinés par injection intradermique, avec des vaccins faiblement dosés et qu’une co-morbidité (p.ex. contamination par le VIH) n’avait pas été formellement exclue chez d’autres.
D’autres preuves de la présence d’une mémoire immunitaire reposent sur l’identification, par la technique Spot Elisa (un test in vitro permettant de détecter les cellules B spécifiques à un antigène), de lymphocytes B circulants capables de produire des anti-HBs dans une cohorte d’adultes vaccinés 15 années auparavant. Alors que 30 % de cette cohorte ne présentaient pas la moindre trace d’anti-HBs, la présence de lymphocytes B à mémoire a été révélée chez tous les membres de la cohorte et tous étaient capables de répondre à l’administration d’une dose de rappel [5] [6].
Ces données ont été confirmées par des études plus récentes. Soixante-quatre personnes en bonne santé précédemment vaccinées et ayant développé suffisamment d’anticorps, mais chez qui les anticorps étaient réduits à moins de 10 mUI/ml, ont montré une réaction rapide et puissante suite à l’administration d’une dose de HBsAg en injection de rappel. Afin de simuler une exposition naturelle, la dose de HBsAg préparée ne comprenait pas le moindre adjuvant [7].

Toutes ces données constituent la base d’un consensus européen, selon lequel le rappel contre l’hépatite B n’est pas recommandé pour les personnes ayant réagi à une primovaccination complète, car la mémoire immunitaire a une action d’au moins 15 ans chez les personnes immunocompétentes. Étant donné la très bonne réaction au vaccin des groupes vaccinés dans le jeune âge, aucun rappel n’est nécessaire pour les nourrissons, les enfants et les jeunes. Cette constatation s’applique également aux adultes à condition qu’ils soient immuno-compétents et qu’un test post-vaccination ait révélé un taux d’anticorps > 10 mIU/ml [1].

Vaccin contre l’hépatite A

Les études de suivi à long terme indiquent la persistance (12 ans) d’anticorps anti-HA V après vaccination. Certains modèles mathématiques mentionnent même une durée supérieure à 25 ans [8].
Tout comme pour l’hépatite B, la persistance d’anticorps anti-HAV a été considérée longtemps comme un indicateur de la protection vaccinale. Une meilleure connaissance de l’immunologie a également démontré que la protection à long terme était en rapport avec une mémoire immunitaire sous-jacente.

Des études menées sur des adultes ont montré que le report de la deuxième dose (24-72 mois après la première) n’influence en rien la réaction immune [9] [10]. Une réaction clinique significative a été enregistrée chez 25 voyageurs âgés de 36 à 50 ans qui avaient reçu l’injection de rappel 48 à 72 mois après la première injection. Même lorsque les anticorps ont entre temps disparu, une réponse immunitaire adéquate est présente. Ceci démontre l’action d’une mémoire immunitaire [9] [10].
Très tôt, des études menées sur des chimpanzés ont montré l’existence d’une mémoire immunitaire suite à une vaccination anti-hépatite A. Lorsqu’ils étaient vaccinés à l’aide d’antigènes du virus de l’hépatite A inactivé à la formaline, ils étaient protégés contre le VHA, même en l’absence d’anticorps anti-VHA quantifiables [11]. Ces données établissent que la présence d’anticorps anti-VHA quantifiables n’est pas une condition sine qua non d’une immunité protectrice.
Des études in vitro portant sur l’immunité cellulaire spécifique au VHA ont indiqué que le vaccin anti-hépatite A était capable de générer, quelques années après la vaccination, des lymphocytes B à mémoire produisant des anticorps anti-HA de type IgG [12].
Les données du suivi de 31 adultes (âgés de 32 à 40 ans) montrent une présence prolongée (12 ans) d’anticorps suite à la primovaccination [13]. En administrant, 12 ans plus tard, une demi dose de rappel, la concentration moyenne en anticorps est passée de 242 au jour 0 à 877, 3.831 et 5.282 mUI/ml au bout de 7, 14 et 30 jours. Ces données confirment, elles aussi, la persistance d’une mémoire immunitaire.
Toutes les données disponibles montrent que les vaccins anti-hépatite A donnent une protection de longue durée aux personnes immunocompétentes. C’est pourquoi un rappel contre l’hépatite A n’est plus recommandé lorsqu’une primovaccination complète a été administrée.

Conclusions

En cessant l’administration des rappels contre l’hépatite A et l’hépatite B aux personnes immunocompétentes, il est possible de réaliser d’importantes économies et de consacrer davantage d’attention aux programmes de vaccination universelle.
Toutes les données disponibles indiquent que l’immunogénicité d’un vaccin combiné contre l’hépatite A et contre l’hépatite B est comparable à celle des vaccins pris séparément [14]. Il n’y a donc aucune raison d’administrer un rappel si ce vaccin est utilisé en lieu et place des vaccins distincts pour la primovaccination.

Prof. P. Van Damme - Dr. Koen Van Herck
Universiteit Antwerpen

Pour la pratique

Selon un récent consensus européen, le rappel de vaccination contre l’hépatite B n’est pas recommandé dans les groupes ayant été vaccinés à un jeune âge. On considère que le rappel n’est plus nécessaire chez l’adulte car on sait qu’on obtient des taux d’anticorps protecteurs chez 95% des adultes vaccinés. Un contrôle sérologique peut s’avérer utile pour des patients ayant un risque élevé de contamination. Le rappel contre l’hépatite A n’est, lui non plus, plus recommandé chez les personnes ayant reçu une primovaccination complète.

[1European Consensus Group on Hepatitis B Immunity. Are booster immunisations needed for lifelong hepatitis B immunité ? Lancet 2000 ; 355:561-565.

[2Jilg W, Schmidt M, Deinhardt F. Persistence of specific antibodies after hepatitis B vaccination. J Hepatol 1988 ; 6 : 201-07.

[3Banatvala JE, Van Damme P. Hepatitis B vaccine – do we need boosters. J Viral Hepatitis 2003, 10 ; 1-6.

[4Banatvala JE, Van Damme P, Oehen S. Lifelong protection against hépatites B : the role of vaccine immunogenicity in immune memory. Vaccine 2001 ; 19 : 877-885.

[5Boland GJ, De Gast GC, Italiander E, van der Reijden J, van Hattum L. Long term immunity to hepatitis B infection after vaccination with recombinant hepatitis B vaccine. Hepatology 1995 ; 22 : 325.

[6Wismans P, van Hattum J, de Gast GC et al. A prospective study of in vitro anti-HBs producing B cells (spot-ELISA) following primary and supplementary vaccination with recombinant hepatitis B vaccine in insulin-dependent diabetic patients and matched controls. J Med Virol 1991 ; 35 : 216-22.

[7Dentico P, Crovari P, Lai PL et al. Anamnestic response to administration of purified non-adsorbed hepatitis B surface antigen in healthy responders to hepatitis B vaccine with long-term non- protective antibody titres. Vaccine (submitted, 2002).

[8Van Herck K, Renard D, Molenberghs G, V an Damme P . Model-based estimates of long-term persistence of vaccine induced hepatitis A antibodies. In : Margolis H, Alter M, Liang T, Dienstag J, eds. Viral Hepatitis and Liver Diseases. Proceedings of the 10th International Symposium on Viral Hepatitis and Liver Diseases, April 9-13, 2000, Atlanta, USA : International Medical Press, Atlanta, USA, 2002 : 56- 9.

[9Landry P, Tremblay S, Darioli R, Genton B. Inactivated hepatitis A vaccine booster given >/=24 months after the primary dose. Vaccine 2000 ; 19 : 399- 402.

[10Iwarson S, Lindh M, Widerstrom L. Excellent booster response 4-6 y after a single primary dose of an inactivated hepatitis A vaccine. Scand J Infect Dis 2002 ; 34 : 110-1.

[11Purcell RH, D’Hondt E, Bradbury R, Emerson SU, Govindarajan S, Binn L. Inactivated hepatitis A vaccine : active and passive immunoprophylaxis in chimpanzees. Vaccine 1992 ; 10 Suppl 1 : S148-51.

[12Chen X. The immune response to hepatitis A vaccination : studies in vivo and in vitro : University Hospital Utrecht, 1996.

[13Van Damme P , V an Herck K. Hepatitis A vaccination : more convenience for thé traveller ? 3rd European Conference on Travel Medicine 2002, Florence, Italy, 15-18 May : Abstract 31.

[14Van Damme P, Leroux-Roels G, Law B, et al. Long-term persistence of antibodies induced by vaccination and safety follow-up, with the first combined vaccine against hepatitis A and B in children and adults. J Med Virol 2001 ; 65 : 6-13.


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