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Grippeprint

Bilan de la saison 2009

publié le mercredi 1er septembre 2010

Diverses publications récentes permettent de mieux cerner la morbidité et la mortalité liées à la grippe pandémique A(H1N1) 2009, et ainsi de préciser le contexte des recommandations pour la saison grippale 2010-2011. Il est bien établi que la grossesse et l’obésité représentent deux facteurs de risque particulièrement importants en cas d’infection par le virus A(H1N1) 2009.

Un article collectif publié par un Writing Commitee of the WHO Consultation on Clinical Aspects of Pandemic (H1N1) 2009 Influenza [1] synthétise des données internationales sur divers aspects de la pandémie.
La majorité des infections causées par le virus A(H1N1) 2009 ont été aiguës et autolimitées ; le taux d’attaque le plus élevé a été constaté parmi les enfants et les jeunes adultes. La relative protection des personnes âgées de 60 ans et plus est liée aux expositions antérieures de ces personnes à des virus de la grippe ayant des similitudes antigéniques, ce qui leur a conféré un certain degré de protection croisée.
Le taux de létalité global (overall case fatality rate) a été inférieur à 5 pour 1.000. Contrairement à la grippe saisonnière, la majorité des affections graves causées par le virus pandémique sont survenues parmi les enfants et les adultes jeunes.Environ 90% des décès ont touché des personnes de moins de 65 ans.
Le taux d’hospitalisation a été le plus élevé pour les enfants âgés de moins de 5 ans (et plus particulièrement ceux âgés de moins d’un an), et le plus bas parmi les personnes de 65 ans et plus. Cependant, le taux de létalité parmi les patients hospitalisés a été le plus élevé parmi les personnes âgées de 50 ans et plus.
La transmission de l’infection s’est faite de manière similaire à celle de la grippe saisonnière. On estime le nombre de cas secondaires à partir d’un cas index entre 1,3 à 1,7 (comparable à légèrement supérieur à la situation rencontrée lors d’une grippe saisonnière). Ce taux de reproduction peut atteindre 3,0 à 3,6 en cas de promiscuité, comme par exemple lors d’épidémie en milieu scolaire.

Facteurs de risques

Parmi les malades hospitalisés, on constate, en comparaison avec la grippe saisonnière, une surreprésentation de personnes présentant (à l’exception de l’âge > 65 ans) les facteurs sous-jacents de risque de complications tels que classiquement décrits pour la grippe saisonnière. Les femmes enceintes (surtout durant le 2e et 3e trimestre de grossesse), les femmes dans les 2 semaines suivant l’accouchement et les patients immunodéprimés sont surreprésentés.
Les personnes présentant une obésité sévère (BMI ≥ 35) ont eu un taux d’infections sévères ou fatales multiplié par 5 à 15 en comparaison de la population générale.

Le cas particulier des femmes enceintes

Les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables à l’infection par le virus A(H1N1) 2009. Les femmes enceintes, qui représentent seulement 1 à 2% de la population touchée par le virus A(H1N1) 2009 constituent 7 à 10% des patients hospitalisés, 6 à 9% des patients ayant été admis en USI et 6 à 10% des patients décédés.
Les complications obstétricales comportent la détresse fœtale, l’accouchement prématuré, la délivrance par césarienne et la mort fœtale. Ainsi, dans une analyse observationnelle menée dans deux centres aux Etats-Unis [2], comportant 18 patientes enceintes admises avec une infection H1N1 confirmée -soit par une identification antigénique directe sur prélèvement nasopharyngé (n=14), soit par culture virale ou rRT-PCR (n=4)-, on a constaté que :
 3 cas ont nécessité un séjour en unité de soins intensifs
 7 patientes ont accouché pendant l’hospitalisation, dont 6 prématurément et 4 via une césarienne pratiquée en urgence
 deux cas de morts fœtales sont survenus.

Il n’y a pas eu de décès parmi les femmes. Les comorbidités les plus fréquentes étaient l’asthme, la drépanocytose et le diabète. La moitié des patientes présentaient une symptomatologie gastro-intestinale.

Le système de surveillance de l’Influenza A(H1N1) instauré par les Centers for Disease Control and Prevention aux Etats-Unis entre avril et août 2009 a collecté des données pour 788 femmes enceintes et infectées par le virus A (H1N1) [3]. Parmi ces femmes, 30 sont décédées -5% de tous les décès attribués en 2009 à l’Influenza A(H1N1)- ; 509 femmes ont été hospitalisées dont 115 (26%) dans une unité de soins intensifs (USI).
Les femmes enceintes ayant reçu un traitement antiviral plus de 4 jours après le début des symptômes avaient un risque six fois plus élevé de séjour en USI.
Les données de surveillance jusqu’au 31/12/2009 montraient un nombre additionnel de 165 femmes enceintes admises en USI dont 56 sont décédées. Parmi ces décès, 4 sont survenus au cours du 1er trimestre de la grossesse, 15 durant le 2e et 36 durant le 3e.
En Angleterre, les données disponibles montrent que le risque de décès en cas d’infection pendant la grossesse atteignait 9 cas pour 10.000. Pour les femmes enceintes, le risque relatif d’infection fatale était multiplié par 7 par rapport aux femmes de 15 à 44 ans sans facteurs de risque [4].

Les personnes appartenant à d’autres groupes à risque

Les données de surveillance collectées au Royaume-Uni (Angleterre, Pays de Galles, Ecosse et Irlande du Nord) ont identifié, entre le 27 avril 2009 et le 12 mars 2010, 440 décès attribués à l’Influenza A(H1N1) [4]].
L’épidémie s’est déroulée en deux phases : durant l’été avec un premier pic pendant la première semaine du mois d’août (début des vacances scolaires) et en automne avec un deuxième pic vers la mi-novembre. 17% des décès sont survenus durant la vague de l’été 2009 et 83% durant la vague débutant à l’automne 2009.
Le taux de décès (case fatality rate) par grippe A(H1N1) atteignait 4 pour 10.000 infections cliniques.
Pour les 336 décès survenus en Angleterre, l’âge moyen des cas était de 41 ans (pour la grippe saisonnière : 66 ans - données collectées de 2001 à 2009). Les décès liés aux grippes saisonnières antérieures concernaient, dans 69% des cas, des personnes âgées de 65 ans et plus ; par contre, seuls 15% des personnes décédées de grippe A(H1N1) appartenaient à ce groupe d’âge.
Le taux de mortalité par grippe A(H1N1) était également plus élevé dans la population des enfants de moins de 1 an que dans les autres groupes d’âge. La double appartenance au groupe d’âge de 65 ans et plus et à un groupe à risque en raison d’une maladie amenait le risque de décès à 15/1.000 (contre 1,5/1.000 pour les personnes de 65 ans et plus en bonne santé).
237 décès liés au virus A(H1N1) -77%- sont survenus chez des personnes appartenant à un groupe à risque tel que défini au Royaume-Uni (maladie respiratoire chronique - y compris l’asthme traité au cours des 3 dernières années-, affection cardiaque chronique, affection hépatique chronique, affection rénale chronique, maladie neuromusculaire chronique, accident ischémique transitoire ou permanent, immunodépression liée à une maladie ou un traitement et diabète ; à ces groupes en lien avec la grippe saisonnière ont été ajoutés en 2009, pour la grippe A(H1N1), la grossesse et l’obésité).
171 des personnes décédées ne présentaient qu’un seul de ces facteurs de risque. Les maladies neurologiques chroniques, respiratoires chroniques et l’immunodépression apparaissent à l’analyse les facteurs de risque les plus fréquents, de manière similaire à ceux retrouvés pour la grippe saisonnière. Cependant, après ajustement pour l’âge, les décès par Influenza A(H1N1) apparaissent plus souvent associés à un facteur de risque que ceux liés à la grippe saisonnière (OR : 2,8).
Chez les enfants de moins de 16 ans, le facteur de risque sous-jacent le plus fréquent était une maladie neurologique, tandis que chez les adultes (> 16 ans), l’immunodépression l’emportait. C’est parmi les adultes âgés de 25 à 44 ans que l’on trouve la proportion la plus importante de décès parmi des personnes n’appartenant pas à un groupe à risque (28/87, soit 32%).
La durée moyenne de l’infection due au virus A (H1N1) menant au décès était de 12 jours.

Complications

Dans les cas létaux d’infections liées au virus A(H1N1), les lésions histopathologiques les plus fréquem-ment constatées sont les atteintes respiratoires : atteinte diffuse alvéolaire avec membranes hyalines, œdème et bronchiolite nécrosante.
L’infection se traduit par une variété de syndromes cliniques, de l’affection afébrile des voies respiratoires à la pneumonie fulminante. Des symptômes systémiques et gastro-intestinaux semblent plus fréquents qu’avec la grippe saisonnière. Le syndrome clinique principal menant à l’hospitalisation et aux soins intensifs est la pneumonie virale diffuse associée à une hypoxémie sévère et une détresse respiratoire (49 à 72% des admissions en USI). D’autres syndromes préoccupants sont les exacerbations sévères et prolongées de BPCO ou d’asthme, les coinfections bactériennes et la décompensation d’affections graves préalablement présentes chez le patient. Les pneumonies bactériennes ont été diagnostiquées chez 26 à 38% des patients décédés. Des cas sporadiques de manifestations neurologiques ont été constatés : confusion, convulsions, inconscience, encéphalites aiguës ou post-infectieuses, etc.
Selon les auteurs, une thérapie avec un inhibiteur de la neuraminidase est particulièrement importante pour les patients présentant des facteurs de risque, dont la grossesse, et pour ceux présentant un état clinique sévère lié au virus A(H1N1).
L’administration d’oseltamivir même après un intervalle de plus de 48 heures après le début des symptômes a été associée avec un taux réduit de décès parmi les personnes hospitalisées infectées par le virus A(H1N1) 2009. En Belgique, il y a plus de réticence à la prescription de cet antiviral.

Conclusions

De nombreuses données ont été récoltées durant la pandémie de grippe A(H1N1) 2009, en un court laps de temps, principalement sur les facteurs de risque et la morbidité/mortalité. Cependant, de nombreuses questions restent encore sans réponses, e.a. quant à la pathogénèse de la maladie, la sensibilité individuelle pour une forme grave de la maladie et le traitement optimal des formes les plus sévères.

Les données de suivi de la grippe dans la zone européenne de l’OMS peuvent être suivies sur www.euroflu.org.

Grippe A(H1N1) dans des hôpitaux pédiatriques bruxellois

Des données partielles provenant de 2 hôpitaux bruxellois (l’Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola - HUDERF- et l’Universitair Kinderziekenhuis Brussel - UZ Brussel ; publications scientifiques en préparation) permettent de mettre en évidence les éléments suivants :
 dans les hôpitaux pédiatriques bruxellois concernés, le pic des cas recensés a été observé en octobre 2009
 l’âge médian des enfants hospitalisés avec un diagnostic confirmé de grippe A (H1N1) était de 3-4 ans environ- les complications survenaient chez des enfants en bonne santé (pour plus de 50% des cas recensés) et chez des enfants présentant un facteur de risque. A côté des facteurs de risque classiques comme les affections respiratoires chroniques et l’immunodéficience, les affections neuromusculaires apparaissent particulièrement fréquentes
 sur les 208 cas recensés, la majorité des patients ont eu des symptômes modérés, mais néanmoins 4 décès sont survenus chez des enfants présentant une affection sous-jacente.

[1Writing Commitee of the WHO Consultation on Clinical Aspects of Pandemic (H1N1) 2009 Influenza. Clinical Aspects of Pandemic 2009 Influenza A (H1N1) Virus Infection. N Engl J Med 2010 ; 362:1708-19.

[2Andrew C. Miller et al. Novel Influenza (H1N1) virus among Gravid Admissions. Arch Intern Med 2010 ; 170 : 868-873.

[3Alicia M. Siston et al. Pandemic 2009 Influenza A (H1N1) Virus Illness Among Pregnant Women in the United States. Jama 2010 ; 303 : 1571-1525.

[4Pebody RG, McLean E, Zhao H, et al. Pandemic Influenza A(H1N1) 2009 and mortality in the United Kingdom : risk factors for death, April 2009 to March 2010. Euro Surveill. 2010 ;15(20):pii=19571. Available online : www.eurosurveillance.org/ViewArticle.aspx ?ArticleId=19571


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