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Vacciner ? Ou ne pas vacciner ?

publié le mercredi 24 avril 2013

Nous avons déjà abordé dans Vax Info l’argumentation des personnes opposées à la vaccination. Un article récent publié dans Human Immunology revient sur ce sujet.

Les auteurs rappellent que les réactions contre la vaccination sont nées au même moment que la vaccination. Dès 1850, en Grande-Bretagne, une ligue a été créée pour s’opposer à la vaccination généralisée contre la variole. Au cours des décennies suivantes, des organisations similaires sont apparues aux Etats-Unis et en Europe. Des arguments ont traversé les époques : la croyance que la vaccination cause plus de dommage que la maladie elle-même, que le vaccin contient des constituants très toxiques, que la vaccination échoue à donner une immunité durable, à l’inverse de la maladie.

Communiquer ?

Par contre, la communication des groupes antivaccinateurs a évolué : rares sont ceux qui, au 21ème siècle, se présentent d’emblée sous l’appellation « anti-vaccinateur ». Les auteurs citent des noms comme « Generation Rescue », « Global Research », « Moms agaist mercury », « The informed parent », « National Vaccine Information Center », « Vaccination Liberation ». En Belgique, citons le « Belfort groupe », le « Vereniging voor vaccinatievrijheid », « Initiative citoyenne ». La réceptivité première du public au message antivaccinal est ainsi améliorée par les détours d’un discours biaisé faisant appel à diverses valeurs généralement partagées.

Le débat entre des experts scientifiques et des personnes opposées de manière irrationnelle à la vaccination est généralement surréaliste, dans la mesure où ces personnes rejettent toute méthode scientifique, la littérature basée sur le peer-review et l’Evidence Based Medecine. Pour les auteurs, il semble donc illusoire de tenter de convaincre des opposants à la vaccination par un discours rationnel mettant en balance avantages et inconvénients, sur base d’une méthode scientifique. Les médecins peuvent par contre jouer un rôle actif pour informer le public, et plus spécifiquement les parents, ainsi que les décideurs, à partir des données scientifiques disponibles et reconnues.

Les grands axes d’opposition

Le spectre des oppositions à la vaccination est varié :

  • mise en évidence de réels mais très rares effets indésirables graves, ou d’effets négatifs supposés des vaccins ;
  • ignorance ou incompréhension des informations de base expliquant le processus de la vaccination, souvent couplée à une acceptation sans esprit critique d’affirmations antivaccinales simplistes ;
  • refus de croire aux données disponibles et publiées, allant parfois jusqu’à l’adhésion à la théorie du complot ;
  • mimétisme par rapport aux positions de certaines célébrités « new age » ou farfelues ;
  • implication personnelle liée à la connaissance d’un effet indésirable réel ou supposé chez un proche, qui fait de l’opposition en la vaccination le combat d’une vie.

Les auteurs s’attardent sur un argument fondamental évoqué par le discours antivaccinal : le manque de sécurité de l’acte vaccinal. Trois fausses représentations soutiennent ce discours du danger :

  • la surcharge du système immunitaire ;
  • la fréquence accrue jugée inacceptable des maladies auto-immunes ;
  • la protection obtenue avec moins de sécurité par rapport à celle conférée par une infection naturelle.

Surcharge du système immunitaire ?

Les enfants recevraient trop de vaccins et on surchargerait ainsi les possibilités de leur système immunitaire. Ce postulat évoque donc une incapacité de l’organisme humain à répondre à un nombre élevé d’antigènes vaccinaux. Les enfants, en particulier, recevraient leurs vaccins beaucoup trop tôt, en raison de leur immaturité immunitaire et devraient faire face « à une tempête de cytokines » à l’origine d’effets indésirables graves.
Les auteurs de l’étude démontent cette croyance en précisant :

  • que dès leur naissance, les bébés rencontrent une multitude de micro-organismes dont la charge antigénique excède largement, en quantité et variété, les antigènes vaccinaux ;
  • que les études préliminaires à la mise sur le marché des vaccins combinés incluent une évaluation de l’efficacité et de la sécurité de ces vaccins, en comparaison avec les vaccins monovalents correspondants. Les données issues de ces études ne montrent aucun signe ou réaction suggérant un phénomène de surcharge immunitaire ;
  • que les études de pharmacovigilance après mise sur le marché, se basant sur des centaines de milliers ou des millions d’enfants ayant reçu des vaccins ne montrent pas plus d’indice de surcharge immunitaire ;
  • qu’actuellement, les enfants reçoivent une exposition antigénique moindre que dans le passé. Par exemple, le vaccin contre la variole des années 1900 contenait plus de 200 protéines, et le vaccin à cellules entières contre la coqueluche plus de 3.000. Les 15 vaccins actuellement recommandés aux Etats-Unis (12 en Belgique) aux enfants jusqu’à l’âge de 5 ans comportent, au total, environ 150 protéines et polysaccharides.

Fréquence accrue inacceptable des maladies auto-immunes ?

Parmi ces maladies, les opposants à la vaccination évoquent plus volontiers le diabète de type 1, la sclérose en plaques (SEP) et le syndrome de Guillain-Barré. De nombreuses études de qualité ont échoué à confirmer que des affections comme le diabète de type 1 ou la sclérose en plaques (SEP) soient le résultat d’une vaccination.
Il n’y a pas non plus actuellement de données scientifiques qui confirment l’hypothèse théorique d’un “mimétisme moléculaire” structurel entre des protéines de ces vaccins et des composants cellulaires humains.

Des associations temporelles avec la vaccination existent bien : ainsi, on évoque souvent l’association possible entre le vaccin contre la grippe utilisé en 1976 et des cas de syndrome de Guillain-Barré survenus à cette époque, ainsi qu’entre des cas de purpura idiopathique thrombocytopénique et la vaccination RRO. Les mécanismes de ces associations restent peu clairs et si elles surviennent occasionnellement, leur fréquence est si faible (environ un cas supplémentaire par million de doses administrées) qu’il est impossible de mener des études sur des groupes de personnes concernées.
Par ailleurs, on a observé que certaines infections naturelles, comme la
grippe, sont aussi associées à des cas de syndrome de Guillain-Barré ; l’hypothèse que certaines maladies, dont on peut être protégé par vaccination, pourraient agir comme inductrices de ce type de maladies est donc également à l’étude.

Protection par vaccination versus infection naturelle ?

L’idée d’un surcroît de risque lié à une protection vaccinale est démentie par de nombreuses observations. Par exemple, le vaccin contre la grippe ne provoque pas de bronchite, de pneumonie, de myocardite, de sinusite, ni d’ailleurs d’absentéisme, comme la grippe elle-même le fait.
L’immunité conférée par la maladie naturelle peut être de plus longue durée que celle obtenue par la vaccination. Mais ce n’est pas toujours le cas : la vaccination contre l’hépatite A et celle contre l’hépatite B entraînent une protection à vie.
Par ailleurs, si une maladie comme la rougeole donne une protection pour la vie, c’est au prix de 1 décès pour 3.000 personnes infectées, sans parler de la morbidité importante qui y est liée. Le vaccin RRO, administré dans les règles, n’a, quant à lui, été associé à aucun décès, alors que des centaines de millions de doses ont été administrées.

Vaccination cocoon

Un couple nous a contacté pour témoigner du décès de leur bébé de 3 mois, suite à une coqueluche. Ces parents étaient révoltés par le fait que la vaccination « cocoon » ne leur ait jamais été proposée alors qu’elle est recommandée par le Conseil supérieur de la santé depuis plusieurs années.

Un rappel de vaccination contre la coqueluche est recommandé chez tous les adolescents âgés de 14-16 ans (vaccin dTpa – BoostrixTM). Les recommandations du Conseil Supérieur de la Santé précisent aussi que « L’administration d’une dose unique de dTpa est également recommandée, quels que soient les antécédents de vaccination (complète ou incomplète) contre la coqueluche, pour les adultes qui n’ont pas reçu de rappel de dTpa à l’âge de 14 à 16 ans et qui sont en contact avec des nourrissons non ou insuffisamment vaccinés (< 12 mois). Il s’agit du principe de la vaccination dite familiale ou cocoon, à savoir : futurs ou jeunes parents, grands parents et leurs contacts familiaux proches ainsi que le personnel soignant en pédiatrie, maternité et dans les milieux d’accueil de la petite enfance et les nourrices de petits enfants. » Un délai de 1 mois est considéré comme l’intervalle minimum sûr entre la dernière vaccination dT et une nouvelle vaccination dTpa.

Des études sont en cours pour évaluer l’impact de la vaccination des femmes enceintes contre la coqueluche.
Lire le témoignage

Conclusions

L’influence du discours antivaccinal est malheureusement parfois dommageable pour la santé des populations. Les auteurs évoquent la discontinuité, dans certains pays, de la vaccination généralisée contre la coqueluche, en raison des pressions contre l’usage de ce vaccin. Le résultat de tels arrêts dans la protection offerte aux populations se traduit par une morbidité et une mortalité par coqueluche 10 à 100 fois plus élevées par rapport aux pays où la vaccination se poursuit.
Le rôle d’informateur scientifique du médecin vis-à-vis de la population est donc essentiel, tout comme celui des experts vis-à-vis des pouvoirs publics.

Références :
G.A. Poland, R. M. Jacobson. The clinician’s guide to the anti-vaccinationists’ galaxy. Human Immunology 73 (2012) : 859-866.


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