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Oreillonsprint

Persistance d’un risque épidémique

publié le mercredi 11 septembre 2013

Les oreillons sont une maladie infectieuse toujours bien présente en Europe : ainsi, près de 950.000 cas ont été rapportés de 2000 à 2008, auprès de l’European Center for Disease Control (ECDC). Cette infection revient par poussées épidémiques régulières dans notre pays et ailleurs en Europe.

Néanmoins, entre 2006 et 2010, on a observé une diminution du nombre de cas rapportés (de 8,7 à 1,98 pour 100.000).

Données épidémiologiques

En 2010, 11.755 cas ont été déclarés auprès de l’ECDC par 27 Etats de l’Espace économique européen, dont 7.103 cas confirmés par laboratoire (1). Ceci correspond à une incidence des cas confirmés de 1,98 pour 100.000 habitants. Les taux les plus élevés étaient constatés en République
tchèque (9,45/100.000), au Royaume-Uni (7,07/100.000) et aux Pays-Bas (2,56/100.000). Trois pays ne rapportent pas leurs cas, en raison de l’absence de surveillance : la France, l’Allemagne et le Liechtenstein.
Des épidémies ont été observées aux Pays-Bas, en Allemagne et en Ecosse en 2010.
Parmi les cas confirmés en 2010, 35% concernaient des personnes non vaccinées ; 34% avaient reçu une dose de vaccin et 26% deux doses (absence de données vaccinales dans 5% des cas). Les cas confirmés d’oreillons étaient relevés dans tous les groupes d’âges, avec une prédilection pour les 15-24 ans (9,2/100.000), puis pour les 5-14 ans (4,1/100.000) (graphique 1).
Le rapport homme/femme était de 1,21.

Pour les 7.445 cas pour lesquels cette information était disponible en 2010, un pic saisonnier était constaté au printemps (graphique 2).

Belgique

En mi-2012, une épidémie d’oreillons s’est déclarée en Flandre, au départ
de l’université et de hautes écoles de Gand. La plupart des cas concernaient de jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans. Au total, ce sont 2.178 cas qui ont été déclarés en Flandre en 2012, principalement dans les provinces de Flandre orientale et occidentale. Durant les 6 premiers mois de l’année 2013, 2.908 nouveaux cas ont déjà été déclarés.
En Wallonie, 1.086 cas ont été déclarés entre le 1er janvier et le 30 juin 2013.
La majorité des cas concernaient des adolescents et des jeunes adultes.

Ce qu’il faut savoir sur les oreillons

Virus

Les oreillons sont provoqués par un RNA virus de la famille des paramyxoviridae. Les humains constituent le seul réservoir du virus.
Contrairement à ce que l’on pensait initialement, plusieurs souches de virus existent : ceci a été démontré par détermination des anticorps monoclonaux. Des réinfections par ces différents génotypes, subcliniques ou symptomatiques, peuvent survenir, tant chez des sujets vaccinés que non vaccinés. Un décalage entre la souche de type sauvage en circulation et la souche vaccinale peut évidemment influencer l’efficacité de la vaccination.
Cette diversité de génotypes, conjuguée à une baisse progressive de l’immunité après la vaccination, est un des facteurs explicatifs des épidémies qui peuvent survenir parmi des personnes vaccinées.
Le virus peut être isolé. Une PCR est réalisée à partir de prélèvements nasopharyngés, d’urine ou de salive. Ce test est suffisamment sensible lorsque les échantillons sont prélevés durant la première semaine suivant le début de la parotidite. Cette technique permet également de déterminer le génotype viral. Les anticorps spécifiques (IgM et IgG) peuvent être dosés par tests d’immunofluorescence, IFT ou Elisa.
Chez des personnes non vaccinées, le test le plus significatif est la présence d’IgM sériques ; elles apparaissent généralement 3 jours après le début de la maladie et restent identifiables pendant quelques semaines.
Pour les personnes vaccinées, la sensibilité de la mesure des IgM est insuffisante ; chez elles, une PCR est recommandée. Une augmentation significative (au moins multiplication par 4) des IgG spécifiques entre la phase aigue et la phase de convalescence est très fiable, mais nécessite 2 prélèvements sanguins, dont le premier de préférence dans les 3 jours après l’apparition de la maladie.

Clinique

Les oreillons sont devenus, au fil des années de vaccination, une maladie que les médecins rencontrent moins souvent.
Avant la généralisation de la vaccination, les oreillons touchaient pratiquement tous les enfants, survenant par vagues épidémiques le plus souvent à la fin de l’hiver et au printemps. Cependant, on observait aussi, occasionnellement, des épidémies parmi les jeunes hommes à la période du service militaire.
Depuis l’introduction de la vaccination, la maladie est devenue rare chez les jeunes enfants. Cependant, des poussées épidémiques touchent périodiquement des adolescents et des jeunes adultes.

Les oreillons sont initialement une infection respiratoire transmise par
voie aérienne
(aérosols et gouttelettes). Cette invasion des voies respiratoires entraîne une virémie, qui est à l’origine de l’atteinte de certains organes (avec un tropisme pour les glandes salivaires). Les personnes infectées peuvent contaminer d’autres personnes, même si elles n’ont pas de symptômes apparents. La période la plus contagieuse va de 1 à 2 jours avant la parotidite jusqu’à 5 jours après le début du gonflement paroditien.
L’incubation est habituellement de 16 à 18 jours, mais la maladie peut survenir de 12 à 25 jours après exposition.
Classiquement, les oreillons se manifestent par un gonflement douloureux (70% des cas) unilatéral ou bilatéral des parotides (joue de hamster). Les autres glandes salivaires peuvent également être gonflées. Dans les 3 à 5 jours précédant cette atteinte parotidienne, un malaise général avec fièvre, maux de tête, myalgies et arthralgies, est souvent constaté. Des formes atténuées sont rencontrées dans 20 à 30% des infections. Les jeunes enfants peuvent présenter des signes d’infection des voies respiratoires inférieures.

Complications

Les complications des oreillons peuvent suivre ou être concomitantes à l’atteinte des glandes salivaires. Elles peuvent aussi se manifester en l’absence de symptômes salivaires. Il s’agit principalement d’infection du système nerveux central. Le virus ourlien était la principale cause de méningite virale avant la vaccination. Cette méningite est généralement modérée, voire asymptomatique, avec une guérison spontanée.
L’encéphalite, plus grave et accompagnée de troubles de la conscience pouvant aller jusqu’au coma, est plus rare (1,8 à 3 pour 1.000) et responsable de la majorité des décès imputables aux oreillons.
L’orchite est constatée dans 20 à 50% des cas d’oreillons survenant après la puberté ; dans 30% des cas, elle est bilatérale et peut conduire à une oligo- spermie et une diminution de fertilité ; la stérilité est rare, mais une atrophie du testicule atteint survient dans 30 à 40%.
L’ovarite est rencontrée dans 5% des cas survenant après la puberté.
Les oreillons peuvent aussi s’accompagner d’une pancréatite, avec parfois une hyperglycémie transitoire.
Une surdité, unilatérale dans 80% des cas, complique un cas d’oreillons sur 3.400 à 20.000.
D’autres complications rares sont décrites : myocardite (habituellement asymptomatique bien que d’exceptionnels décès lui aient été attribués), arthrite, mastite, thyroïdite, uvéite, néphrite. Lors d’une infection durant le premier trimestre de grossesse, le risque de mort fœtale et de fausse couche est accru.
On ne connaît pas avec précision les conséquences de la maladie parmi le groupe d’âge le plus touché (les 15-24 ans), mais classiquement, les complications sont plus souvent rencontrées chez les adultes que chez les jeunes enfants.
La sévérité de la maladie est atténuée chez les personnes antérieurement vaccinées. (2-3-4)

Vaccination

La vaccination est la seule mesure de prévention.
Le vaccin anti-ourlien est disponible en Belgique depuis 1967, mais il a été recommandé dans les années ‘80 pour la vaccination généralisée des jeunes enfants. La vaccination a surtout démarré en 1985 avec l’introduction du vaccin trivalent rougeole-rubéole-oreillons (RRO). En 1994 apparaît la recommandation d’administrer une 2ème dose de RRO à l’âge de 11-12 ans.
Le seul vaccin disponible actuellement en Europe est la forme trivalente RRO. Selon des modèles mathématiques, une couverture vaccinale de 85 à 90% est indispensable pour obtenir une immunité de groupe (herd immunity) et bloquer la transmission des oreillons (1).
L’efficacité et la sécurité des vaccins dépendent de la souche vaccinale utilisée. La souche Urabe Am9, utilisée jusqu’en 1992 en Belgique, était associée à plus d’effets indésirables, principalement un risque de méningite aseptique (1/20.000 contre 1/100.000 pour la souche Jeryl Lynn, versus 1/400 pour l’infection) ; c’est pour cette raison que le producteur l’a retirée du marché.
La souche Urabe était aussi associée dans les études à des taux de séroconversion plus élevés : 84-97% versus 63-96% pour la souche Jeryl Lynn (3).

Cependant, l’efficacité sur le terrain (effectiveness) de la vaccination est inférieure à celle que l’on pouvait attendre sur base des études cliniques d’efficacité. Lors d’études menées en situation d’épidémie, l’efficacité sur le terrain variait entre 78 et 91% (3). Une étude menée en Belgique chiffrait même cette efficacité à 64% (5).
Les taux d’anticorps obtenus par vaccination sont inférieurs à ceux liés à une infection naturelle. Les bébés de mères vaccinées contre les oreillons perdent les anticorps transmis par la mère significativement plus tôt que les enfants dont la mère a été immunisée par une infection naturelle (4).
Les souches des vaccins commercialisés actuellement en Belgique sont
 la souche ourlienne RIT 4385 (dérivée de la souche Jeryl Lynn) dans PriorixTM
 la souche Jeryl Lynn dans M.M.R. VaxProTM.

Le vaccin est contre-indiqué chez les femmes enceintes et chez les patients atteints d’immunodéficience. Il peut être administré aux porteurs du VIH : enfants de moins de 16 ans avec un taux de CD4 ≥ 15%, ainsi qu’adolescents dès 16 ans et adultes avec un taux de CD4 compris entre 200 et 500/mm3 (6).
Une grossesse doit être évitée dans le mois qui suit l’administration chez une femme.

En pratique
• Le calendrier actuellement recommandé en Belgique repose sur l’administration de deux doses de vaccin RRO : la première est donnée à l’âge de 12 mois, et la deuxième à l’âge de 11-12 ans. Chez l’adulte, en l’absence de cette 2ème dose ou en cas de doute, on recommande l’administration d’une dose de RRO.
• La vaccination post-exposition ne permet pas la prévention des oreillons. Cependant, des études évoquent l’utilité d’une 3ème dose dans un but de contrôle d’une épidémie.
• Les oreillons sont une maladie à déclaration obligatoire.

Déclaration obligatoire

En Communauté française et à Bruxelles
Les oreillons sont depuis 2012 une maladie à déclaration obligatoire. Tout cas confirmé sera déclaré au médecin inspecteur d’hygiène de la Communauté française, dans les 24h (Tél. : 070/246 046 ou www.sante.cfwb.be - cliquer sur “déclaration obligatoire des maladies transmissibles”. A Bruxelles, la déclaration peut se faire sur ce site.

En Communauté française, l’Arrêté du Gouvernement du 14/07/2011 (médecine scolaire) prévoit, en cas d’oreillons :
 une éviction jusqu’à guérison clinique
 la vaccination par le vaccin trivalent RRO des élèves/étudiants de la classe dont l’historique vaccinal serait incomplet ou inexistant (gratuité si rattrapage jusqu’à l’âge de 18 ans)
 une information des parents et des élèves/étudiants.

En Communauté flamande
L’Agentschap Zorg en Gezondheid avait inclus en 2012 les oreillons dans
la liste des maladies à déclaration obligatoire, à la rubrique des maladies infectieuses à caractère épidémique. Concrètement, cela signifie que les médecins et laboratoires devaient déclarer une suspicion d’oreillons au médecin de l’inspection d’hygiène de leur province. Plus d’information.
Cette obligation a été supprimée depuis le 1er novembre 2013.
L’Agence recommande en outre de vérifier l’état vaccinal des proches (famille) et si nécessaire d’administrer une vaccination de rappel. Les personnes de moins de 18 ans bénéficient de la gratuité des vaccins prévue dans le programme de vaccination. Les personnes de plus de 18 ans peuvent acheter le vaccin sur ordonnance en pharmacie. Dans le cas de poussées épidémiques (dortoirs, internats ...), il peut être utile de prélever un échantillon de salive chez un certain nombre de patients, en concertation avec le médecin inspecteur d’hygiène. Dans ces cas, le service Toezicht Volksgezondheid est accessible pour la fourniture du matériel de prélèvement, le transport à l’Institut Scientifique de Santé Publique et la prise en charge des coûts associés.
Il est préférable qu’un patient atteint d’oreillons reste à la maison durant les 5 jours suivant l’apparition des symptômes.

Lire aussi dans Vax Info
 Epidémies d’oreillons dans une école (2005)
 Epidémies dans des populations à haute couverture vaccinale (2009)
 Epidémie en Flandre orientale (2012).

Références :
1 Surveillance report. Annuel epidemiological report. Reporting on 2010 surveillance data and 2011 epidemic intelligence data. 2012. ECDC.
2 http://ecdc.europa.eu/en/healthtopics/mumps/basic_facts/Pages/factsheet_professionals.aspx
3 Plotkin et al. Mumps vaccines. Vaccines.
4 E. Leuridan, N. Goeyvaerts, N. Hens, V. Hutse, P. Van Damme. Maternal mumps antibodies in a cohort of children up to the age of 1 year. European Journal of Pediatrics. 2012 ; 171, 8 : 1167-1173
5 C. Vandermeulen et al. Oreillons : Une
épidémie locale dans une population scolaire bien vaccinée
. Vax Info 38. 2004.
6 Fiche CSS n° 8561 (vaccination des
personnes immunodéficientes et atteintes de maladies chroniques.


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